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Alès : Pierre-André Benoit ou l'art de l'amitié


Le musée Pierre-André Benoit (PAB) d’Alès a souvent exploré les relations que le peintre, poète et éditeur cévenol a entretenu avec un artiste. Juan Miro, Francis Picabia, Jean Dubuffet, Jean Hugo... Cette fois, c’est PAB lui-même qui est à l’affiche avec une rétrospective de son œuvre où s’entrecroisent les plus grands figures de la peinture et de la littérature de la seconde moitié du XXe siècle.

Tout au long de sa carrière - passionnant mélange de talent, de hasard, de culot - PAB a fait paraître plus de 750 livres d’artistes, notamment un quart de minuscules, petits trésors qui sont sa signature et que s'arrachent aujourd'hui les bibliophiles. Tous sont aujourd'hui conservés dans les réserves de la Bibliothèque nationale de France.

Passionné par la poésie

Construite de façon chronologique, l’exposition s’organise autour des rencontres successives et des amitiés primordiales, mélangeant les publications nées de ces rencontres, quelques archives notamment les maquettes des livres ou les matrices des gravures et les œuvres des artistes, issues des collections du musée ou prêtées par plusieurs grands musées.

Né en 1921, PAB se découvre rapidement une passion pour la poésie. Dès l’âge de 20 ans, il entame une correspondance avec des écrivains et en 1942, il obtient un texte inédit de Paul Claudel, La Rose et le Chevrefeuille, qu'il fait paraître illustré par Othon Coubine. A la même époque, PAB rencontre également le grand critique d’art Michel Seuphor, installé à Anduze, premier directeur de conscience qui va faire évoluer son goût. Ce n’est que le début d’une incroyable aventure, de fructueuses collaborations, d’inventions incessantes et de relations épistolaires très denses avec les grands créateurs de son temps, échangeant par exemple plus de 900 lettres avec René Char.

Dans les années 50, PAB commence à se faire un nom. La mode est aux livres richement ornés. PAB au contraire aime le détail, le dépouillement, il construit ses livres sur une élégance du vide, le texte parfois niché dans un coin. Et les plus grands artistes affluent, chacun en entraînant un autre dans son sillage.

Dès le début de sa carrière, il signe le mythique Chi Lo Sa avec Francis Picabia, un jeu étourdissant de typographie, Le Saint Masqué, livre troué évoquant les points des tableaux du dernier Picabia ou la revue 591 et ses dessins pleins d'ambivalence... Il achète aussi plusieurs de ses dernières toiles abstraites.

Avec Jean Arp, il cultive son goût pour l’abstraction signant onze livres illustrés des formes nuageuses de l’artiste. Une sculpture de l’artiste vient compléter la présentation. Par l’intermédiaire de René Char et Tristan Tzara, il rencontre Juan Miro et les couleurs explosent. Ensemble, ils réaliseront vingt-quatre livres, aux illustrations très libres notamment grâce à la technique de gravure sur celluloïd.

Grâce au Nîmois Jean Paulhan, éditeur chez Gallimard, son chemin croise celui de Georges Braque. De leur amitié, naîtront vingt-deux publications. C’est notamment l’époque des oiseaux, motifs récurrents dans l’œuvre de l’ancien cubiste et de l’artiste alésien qui possédait plusieurs œuvres de son ami. On découvre également une facette plus érotique avec André Masson.

Autre incontournable, Pablo Picasso. Dans les années 50, le maître est au sommet de sa notoriété. Intouchable ! Mais PAB le contacte pour lui demander une illustration, joignant à sa lettre une plaque à graver que Picasso lui retourne un mois plus tard. Grâce au soutien de Jacqueline, la collaboration va se poursuivre pour dix-sept livres illustrés notamment de motifs tauromachiques ou évoquant les sujets mythologiques.

Ce qui plaît tant à tous ses artistes, c’est la rapidité avec laquelle travaille PAB mais aussi son insatiable curiosité. Ainsi avec Picasso et Tzara, réalise-t-il La Rose et Chien, poème qui ne s’arrête jamais selon le système coulissant des livres d’astronomie. Avec Jean Dubuffet, il troque les traditionnels caractères d’imprimerie contre des tampons. Avec Jean Hugo, il cultive un sens de la miniature. C’est d’ailleurs lui qui l’avait lancé sur la piste des minuscules. Dans les années 60 et 70, il multiplie les livres avec Camille Bryen, Maria Helena Viera da Silva, James Guitet...

Sur la fin de sa vie, PAB noue une belle amitié avec Pierre Alechinsky jusqu’à une œuvre mystérieuse, réalisée à l’extrême fin de sa vie, à partir des vitraux de l’artiste insolés sur papier photo. L'innovation jusqu'au bout... Pierre Alechinsky ignorait l’existence de ces images, il les a découvertes lors du vernissage de cette exposition incontournable.

Jusqu’au 16 octobre. Tous les jours, 14 h à 18 h. Musée PAB, rue de Brouzen, Rochebelle, Alès. 5 €, 2,50 €. 04 66 86 98 69.

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