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Avignon : la légèreté de Raoul Dufy au musée Angladon


Le musée Angladon d'Avignon accueille une collection privée d'une soixantaine d'oeuvres de Raoul Dufy.

« Ce que j’ai voulu montrer en peignant, c’est comment sont les choses et la vie, à mes yeux et dans mon cœur », expliquait Raoul Dufy, à l’honneur avec une exposition au musée Angladon à Avignon dont on ressort les yeux pétillants de couleurs. D’abord post-impressionniste, le peintre d’origine normande s’est nourri des expériences des fauves et des cubistes pour trouver son propre langage, son vocabulaire personnel. Souvent réduit à un artiste mondain, il échappe à une histoire de l’art linéaire tout en dialoguant de façon intuitive avec tous les grands créateurs de la première moitié du XXe siècle.

La cinquantaine de toiles et d’aquarelles que présente le musée, prêtées par un collectionneur privé, montre la grâce et la légèreté qui imprègnent ses œuvres, mais aussi les évolutions, les remises en question, les innovations qui vont triompher avec La Fée électricité, chef-d’œuvre de 1937, peint pour l’exposition universelle. La vaste fresque de 600 mètres carrés était présentée dans un bâtiment construit par Mallet-Stevens, elle est aujourd'hui visible au musée d'art moderne de la ville de Paris. L’événement est évoqué en toute fin d’exposition, avec des études puis les lithographies tirées à partir de cette vaste composition très documentée, ode à l’énergie, aux savants, au progrès industriel, à la vie moderne.

Très loin des débuts de l’artiste... Dans ses premières gravures sur bois, Raoul Dufy montre son intérêt pour le primitivisme, Gauguin et les peintres de Pont-Aven, les arts africains qui arrivent en Europe. Séduit par ces premières images, le poète Guillaume Apollinaire lui demande d’illustrer son bestiaire.

Sans œillère, Raoul Dufy s'intéresse aussi aux arts décoratifs, à la mode. Pendant la Première Guerre mondiale, il s'inspire des uniformes des soldats, signe des affiches d’un trait à la fois fidèle, mais fin et vivant. En 1917, à la demande de Paul Poiret, star de la couture de l’époque, il illustre sa collection, peignant de façon très libre les robes du créateur, avec des lignes légères, du mouvement, donnant une allure d'aisance aux modèles. La collaboration avec Paul Poiret, ami des artistes qui travaillera également avec Sonia Delaunay, sera très fructueuse. Raoul Dufy conçoit de façon exclusive des motifs pour les tissus du couturier, en utilisant des tampons, une technique identique aux gravures sur bois. L’exposition montre quelques fleurs aux teintes vives, inspirées par les jardins méditerranéens qui naîtront de ce travail en commun.

Car si Raoul Dufy est né au Havre, il va rapidement regarder vers le Sud. Illustrant le Tartarin de Tarascon de Daudet, ses images invitent au voyage vers l’Orient, débordent de façon peu commune sur le texte. Affirmant peu à peu son style, il cultive un art de la couleur plein de fraîcheur et de délicatesse. Raoul Dufy se rend compte qu'en observant une scène, les formes filent, les mouvements s’effacent, mais la couleur imprègne plus longtemps la rétine. C’est cette sensation qu’il tente de reproduire, par exemple avec ses vues des hippodromes ou avec son panorama de Paris et de la tour Eiffel, résumé éblouissant de la ville lumière, la vieille dame de fer au premier plan puis un prolongement dans lequel le regard se promène avec ses atmosphères changeantes, un curieux mélange de nature et de ville, de grisaille et de lumière.

A l’aquarelle, comme en peinture, il joue avec une matière très liquide pour créer des transparences, sur lesquelles il vient poser ses figures, toujours élégantes, d'un trait dansant, virevoltant. Passionné de musique (son père dirigeait une chorale, sa mère était violoniste), il peint des orchestres dans des toiles construites comme des partitions où alternent les rythmes et les silences afin de faire résonner la musique dans ses toiles.

Dans ses scènes d’intérieur, il fait pénétrer l’extérieur dans les salons, multiplie les perspectives avec un jeu subtil de fenêtres matissiennes et de miroirs, montre son intérêt précieux pour les arts décoratifs. Dans les dernières années de sa vie au début des années 1950, souffrant de problèmes d’articulations, son trait se fait moins virtuose. Il lui suffit alors de quelques traits vifs, nerveux, comme calligraphiés. Mais il sait exactement où il va poser ses couleurs et le dessin se dilue peu à peu dans un art de la sensation.

Jusqu'au 27 août. Mardi au dimanche, 13 h à 18 h. Musée Angladon, 5 rue Laboureur, Avignon. 8 €, 6.50 € réduit, 3 € - 25 ans, 1.50 € - 14 an. 04 90 82 29 03.

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