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Nîmes : Topologie de l'absence, traces contemporaines de l'homme au CACN


Avec "Topologie de l'absence", le Centre d'art contemporain de Nîmes rassemble des artistes explorant les paysages et les architectures d'aujourd'hui.

Il suffit de se promener à la périphérie de n'importe quelle ville pour le constater avec effroi. La modernité produit des paysages étranges, à la fois bâtis par l’homme et pourtant sans humanité. Ultra moderne solitude, comme dit la chanson... Avec "Topologie de l’absence", le Centre d’art contemporain de Nîmes accueille des artistes étudiant ces environnements dépeuplés. Dans un accrochage minimal et dépouillé, les œuvres interrogent la place de l’homme dans ces architectures. Il est absent, c’est-à-dire que le regard s’attend à le trouver physiquement et doit se contenter de ses traces. Pas montré directement, il est là, hors cadre où se tissent des récits que suggèrent les œuvres. L’héritage des utopies et des rêves d’émancipation laissent la place à des constructions oubliées.

Caroline Bach s’intéresse aux usines, aux luttes ouvrières. Mais elle ne photographie pas les manifestations avec syndicalistes et mégaphones. Avec distance, elle montre les vestiges, les stigmates de ces histoires sur des régions désindustrialisées, les bâtiments abandonnés, le bitume brûlé par les pneus, les banderoles qui restent accrochées après les conflits. Les hommes ont disparu avec la production, dévorés par le système.

Audrey Guiraud, passée par les Beaux-arts de Nîmes, s’intéresse aussi aux architectures d’usine. Elle a été intriguée par des bâtiments où elle ne voyait jamais personne. Dans la série Invisible City, elle photographie des angles, des petits détails qui se détachent sur des larges ciels gris. Sans aucun contexte, ces images gomment toute fonction à ces entrepôts de tôle, simples décors esthétiques qui n’attirent jamais le regard et se trouvent discrètement, mais subitement, mis en lumière.

Ces détails que plus personne ne remarque créent peu à peu des paysages absurdes, des environnements incompréhensibles, illisibles. En suivant les petites routes, Eric Tabuchi dresse des inventaires, un peu à la manière de Bernd et Hilla Becher. Il présente une série d’Architectures d’entraînements, des tours destinées aux pompiers, d’autres plus mystérieuses, isolées, incongrues, au milieu de nulle part. Avec Nelly Monnier, il construit des petits modules de bois, des Nouvelles architectures tertiaires, avec des matériaux pauvres, rêveries modernistes dégagées de toute utilité, de tout but fonctionnel. Nelly Monnier peint aussi les interventions maçonnées de l’homme au milieu de la nature. Mais que racontent ces morceaux de béton ? Dans des couleurs fanées, elle donne à voir des décors bruts, des interventions très graphiques que personne ne viendra jamais contempler dans des campagnes abandonnées. On est loin des univers métaphysiques à la Chirico... Voici des petits massacres loin des regards, bien réels et qui pourtant semblent surréalistes.

L’absurdité se poursuit avec les photos d’Anaïs Boileau qui a travaillé autour des constructions côtières au Liban. Avec un montage, elle pose dans un paysage désertique la photo d’un immeuble à naître, d’après l’image publicitaire de l’affiche destinée à vendre un bonheur climatisé au milieu des rochers. Dans une autre image, aucun montage, elle montre simplement la portion très dense d’un quartier contemporain. Les volets sont fermés, quelques plantes vertes sont sur les balcons, personne ne semble habiter les buildings flambant neufs, qui s’emboîtent, s’enchevêtrent avec une incroyable densité. Les formes rondes et les angles se mélangent, semblant tracer plusieurs perspectives contradictoires comme dans une gravure de Maurits Cornelis Escher, le soleil en plus.

En contrepoint, la sculpture de Guillaume Le Moine propose un peu d’évasion. Avec des baguettes destinées aux maquettes d’architecte et un pistolet à colle, il crée deux volumes tout en légèreté qui s’épousent avec délicatesse et tiennent débout, en équilibre grâce à des pièces d’obsidienne, des roches vitrifiées par la chaleur des volcans, venues des tréfonds de la terre. Au centre, une photo floue est gravée sur un rond de granit sombre, portant secrètement en elle des mystères à déchiffrer, mais qui ouvrent l'esprit vers des horizons bien plus larges que ces topologies de l'absence.

Jusqu'au 16 décembre. Mardi au samedi, 10 h-18 h. Centre d'art contemporain de Nîmes, 25 rue Saint-Rémy, Nîmes. Entrée libre. 09 86 41 60 33.

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