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Arles : tout le luxe de l'époque antique


Le musée de l’Arles antique expose pour la première fois en France le trésor de Berthouville et une série de pièces exceptionnelles illustrant ce qu'était un mode de vie luxueux à l'époque romaine.

L’histoire est incroyable, comme toutes les grandes découvertes archéologiques. Un jour de 1830, retournant un champ qu’il venait d’acquérir, Prosper Taurin a découvert à Berthouville, dans l’Eure une dalle de pierre, avec dessous une fosse maçonnée et à l’intérieur 93 pièces d’argenterie antique quasiment intacte. Très chrétien, le paysan n’ose pas toucher à ces objets qu’il identifie immédiatement comme païen et les sort avec sa pioche. Prosper Taurin pense d’abord à fondre l’ensemble pour récupérer le prix du métal précieux. Mais un érudit local l’en dissuade et publie la découverte. Le musée du Louvre s’intéresse à l’événement, mais après un affrontement, c’est finalement la maison du roi qui va acquérir l’ensemble.

Conservé désormais au cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale de France, récemment restauré aux États-Unis par le Getty Center de Los Angeles, ce fabuleux trésor de Berthouville est présenté pour la première fois en France de façon complète au musée de l’Arles antique à l’occasion de l’exposition "Le luxe dans l’antiquité", présentée d’abord à Los Angeles, San Francisco, Kansas City, Houston, bientôt Copenhague et peut-être New York. Autour des pièces d’argenterie de Berthouville, des pièces exceptionnelles sont réunies pour montrer ce qu’était le mode de vie luxueux à l’époque romaine.

En introduction, le fameux Camé de Chartres montre la fascination exercée par le modèle antique. Taillé dans une sardonique à trois couches, le bijou romain est inséré dans une monture dorée réalisée sous Charles V au XIVe siècle, premier roi collectionneur qui l’offrira au culte de la Vierge à Chartres, réunissant de façon étonnante une représentation de Jupiter, maître païen de la foudre, avec des versets de l’évangile, inscrits dans la précieuse monture.

L’exposition évoque d’abord l’importance de l’or, métal précieux par excellence et véhicule de l’image du pouvoir impérial. Mais l’or sert aussi pour l’apparat, comme le montre la patère de Rennes, découverte au XVIIIe siècle en Bretagne et datant du début du IIIe siècle. Le plat arbore un décor hyperdéveloppé avec une succession de monnaies montées alternant les figures issues de la dynastie des Antonin et des Sévère, et en son centre une scène figurant le triomphe bacchique, symbole d’un mode de vie héritier du modèle grec, ce fameux “otium dans l’honneur” qu’affectionnent les aristocrates écartés du pouvoir politique, contrait à un délassement cultivé respectant les grandes vertus romaines.

L’or est bien sûr utilisé pour les bijoux. Découvert en Lorraine, le trésor de Naix brille notamment par un collier intact, avec ses camées et ses monnaies montées. En deux pièces seulement, l’exposition montre que ce mode de vie luxueux était étendu sur tout l’Empire et non seulement dans les grands centres urbains d’Italie. Le luxe a même une fonction politique, il sert à la diffusion du monde de vie romain et pénètre les intérieurs. Les parfums sont conservés dans des flacons précieux. Statuettes de bronze et décors en marbre décorent les maisons. Une mosaïque, issue de la fabuleuse Villa Adriana près de Rome, montre l’extrême raffinement que cet art peut atteindre avec de minuscules tesselles.

La vaisselle est aussi démonstrative de la puissance. Découvert dans le Rhône au XVIIe siècle, le mystérieux plat d’Achille, dit bouclier de Scipion, reste mystérieux. Datant du IVe siècle et pesant 10 kilos, il figure probablement une scène de la guerre de Troie et servait dans ce contexte luxueux de support aux conversations érudites entre personnalités de l'élite cultivée...

L’exposition se poursuit ensuite avec l’éclat du trésor de Berthouville, retrouvé dans un temple dédié à Mercure et offert par des dévots pour former des vœux ou remercier le dieu. Certains offrent de la vaisselle domestique, quelques pièces d’argenterie dépareillée, des morceaux qu'ils pourraient faire fondre... D’autres sont plus riches et plus généreux... C’est le cas de Quintus Domitius Titus, d’origine celte, qui a offert un lot incroyable de vaisselle, originaire de Campanie, la région de Naples. En argent repoussé, les vases et coupes en argent étalent avec magnificence une nouvelle fois cet univers bacchique qui ravit les riches romains.

En regard de l’exposition, le musée de l’Arles antique met en avant quelques objets des collections permanentes, montrant ce qu’était le luxe à Arles à l’époque romaine. En plus des pièces dans le parcours d’exposition, c’est l’occasion de présenter pour la première fois au public une toute petite partie des fresques découvertes à La Verrerie, dans une maison datant du Ier siècle avant Jésus-Christ, peut-être même avant la fondation de la colonie par Jules César. Un millier de caisses, conservant des dizaines de milliers de fragments, est en cours de restauration et ne pourra pas être présenté avant plusieurs années. Mais une belle harpiste est déjà visible, fascinante, légère, élégante, ensorcelante. Réalisée dans le deuxième style pompéïen, cette grande figure est très rare. On en connaît qu’une dizaine d’exemplaires de fresques de ce type et uniquement en Italie...

Jusqu’au 21 janvier. Mercredi au lundi, 10 h-18 h. Visites guidées mercredi, samedi, dimanche, 16 h 30. Musée départemental Arles antique, presqu’île du Cirque-Romain, Arles. 8 €, 5 €. 04 13 31 51 03.

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