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Sauve : François Burland, les vaches et les communistes à la galerie Larnoline


La galerie Larnoline à Sauve expose le peintre François Burland et son univers foisonnant influencé par l'art brut.

La parole de François Burland est aussi foisonnante que sa peinture. L’artiste suisse a déjà vécu plusieurs vies, du Sahara aux Alpes. Il est représenté dans la collection "Neuve invention" du musée de Lausanne, réunissant des artistes proches de l’art brut et montre tout l’été ses œuvres dans la jolie galerie Larnoline, au cœur du village médiévale de Sauve, dans le Gard.

L’exposition rassemble des œuvres de différentes périodes. Parmi les plus marquantes, François Burland montre ses étonnants Poyas. Devant les fermes de Gruyère, les propriétaires ont l’habitude d’exposer à l'extérieur des tableaux représentant leurs troupeaux, « pour afficher sa richesse aux autres villageois ». Il détourne cette tradition, s’amusant avec la peur des montagnards de voir débarquer les communistes quand est arrivée la première ligne de chemin de fer. A l'époque, les locaux avaient choisi un écartement de rail différent du reste de la Suisse, afin de ralentir l'éventuelle avancée des rouges ! Les toiles, réalisées avec des brodeuses du Sahara, mélangent les vaches, les paysages alpins et les slogans de façon totalement délirante, truffées d’allusions historiques et de symboles mystérieux que François Burland utilise afin de couvrir tout l'espace de la toile. Immédiatement, ce sens du détail qui vire à l’obsessionnel évoque l’art brut. François Burland a été marqué par le travail de Jean Dubuffet. « J’ai grandi à côté de la collection de Lausanne, ça a été un choc. A 15 ans, je ne pouvais pas comprendre Joseph Beuys », se souvient François Burland, qui voyait dans ces outsiders, soudain mis en valeur, « des prolétaires qui se mettait à créer ».

Avec cette même esthétique débordante, il réalise, lors de séjours en Afrique, des dessins où le texte et l’image se mélangent, pour raconter des histoires où la violence de la guerre côtoie les blagues et les souvenirs. François Burland s’amuse de cette technique foisonnante, « je travaille “à la je m’en fous”, j’aime bien être attrapé par quelque chose de plus fort, me laisser embarquer, voir ce qui va sortir de moi, être surpris ». L’effet est encore plus saisissant avec les séries de la dessin Au nom du père, né parallèlement à un travail de thérapie. Il y exprime son inconscient, ses démons, « toutes les histoires qu’on m’a demandé de garder secrètes », dit-il. Chaque fois, François Burland travaille à partir de matériaux pauvres, du graphite, des papiers d’emballage. « Au départ, c’est parce que j’avais pas d’argent, je vivais dans un squat », se souvient l’artiste, qui a commencé à peindre et à dessiner sur le papier des grands sacs à grains pour les animaux. « Je ne suis pas soigneux, j’aime bien que ce ne soit pas précieux. Avec des papiers japonais, j’aurais eu peur. J’aime bien recycler », explique François Burland, très engagé, notamment dans un travail au long cours avec les enfants migrants. Avec eux, il a réalisé des œuvres, des grandes installations et des sculptures monumentales exposées dans les plus grands musées du monde, prochainement au Macro à Rome.

A Sauve, il présente une série assez géniale née de cette collaboration, des oeuvres qui évoquent l’humour provocateur des affiches de l’atelier populaire de l’école des Beaux-arts en Mai 68. « Cette série a commencé avec l’internet, j’ai été dévoré par le net où apparaît sur le même plan le meurtre d’un enfant et une publicité pour du chocolat. Il n’y a plus aucune valeur dans la manière dont les événements se présentent », explique François Burland, qui a commencé à s’amuser à mélanger toutes ces images qui resurgissait de son enfance dans une Suisse paranoïaque en pleine guerre froide, effrayée par la possible arrivée des communistes. « Il y avait des abris sous les maisons, on répétait dans les écoles comme aux Etats-Unis, on attendait les rouges... A la radio, on entendait les voix étranges qui venaient de l’est. Moi, j’avais des skis rouges, un bonnet rouge, je me suis dit que j’avais attrapé la maladie du communisme et j’avais peur que mes parents le découvrent », s’amuse l’artiste. Avec ses affiches, au graphisme inspiré par la propagande, imprimées sur des emballages de capsules de café, il s’empare des images révolutionnaires de son enfance et renouvelle les slogans. Parmi eux, « regarde bien ta rolex, il est l’heure de la révolte ».

Jusqu'au 24 août. Galerie Larnoline, 2 rue de l'Evêché, Sauve. Entrée libre. 04 66 80 53 03.

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