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Arles : les odyssées du quotidien de Véronique Ellena au musée Réattu


Rétrospective de la photographe Véronique Ellena au musée Réattu à Arles.

Parcourir l’œuvre de la photographe Véronique Ellena, c’est se promener sur un rythme décalé à travers trois décennies de création. La rétrospective que lui consacre le musée Réattu à Arles explore autant l’image que la naissance de l’image. Véronique Ellena travaille à la chambre, ce qui impose un long temps de pause, mais elle produit aussi lentement, des séries qui imposent des projets au long cours. Revendiquant une approche plasticienne de la photo, elle s’approprie des sujets quotidiens, voire triviaux qu’elle métamorphose. « Ce n’est ni du reportage, ni une analyse sociologique ou une étude de mœurs, mais un dialogue entre la petite histoire et la grande histoire, selon Andy-William Neyrotti, commissaire de l’exposition. Il s’agit d’un réalisme à la Courbet, ce que l’on vit au quotidien a autant d’importance que les peintures d’histoire. »

Véronique Ellena a notamment travaillé autour des courses cyclistes, focalisant son regard sur des détails, s’intéressant à un rapport au corps qui relève de la souffrance. Selon l’artiste, « il s’agit d’une épopée mythologique et populaire. » Une photo fait le lien avec la série Ceux qui ont la foi. À la fin d’une étape du Dauphiné libéré, elle croise un coureur sortant d’une voiture avec des bandages. Elle lui propose une photo en lui demandant « de se souvenir du moment où il est tombé. » Son visage se métamorphose et elle saisit un tourment intérieur, un martyre au regard mélancolique, petite croix autour du cou, violentes traces de bronzage sur les bras, doux et triste comme un personnage de Piero della Francesca.

Ainsi, elle photographie aussi des adolescents dans leur chambre, les supermarchés, la banalité d’un dimanche ou des paysages qui lui demandent le même temps d’approche. Jamais d’instantané. « Il faut marcher, s’immerger, traverser le paysage pour poser sa chambre comme un peintre poserait son chevalet. » Dans la ville du Havre, symbole de l’architecture moderne, elle s’intéresse aux habitants qui deviennent « les acteurs de ce décor. » Dans cette ville aride, « difficile à comprendre, comme un grand théâtre », elle photographie notamment un couple s’embrassant à la tombée de la nuit, clin d’œil à un classique, mais totalement à l’opposé dans l’approche.

Ce travail saisit une mémoire, transmet quelque chose de l’âme immatérielle des lieux. Ainsi, dans une partie autobiographique, elle photographie les maisons de sa famille, « sauvegardant la mémoire des disparus qui ont quitté les lieux. » Cet intemporel est encore souligné dans certaines photos qu’elle tire en négatif ou dans un vitrail qu’elle réalise spécialement pour le musée, après une première aventure pour la cathédrale de Strasbourg en compagnie du maître verrier Pierre-Alain Parot.

L’une des parties les plus impressionnantes de l’exposition est le fruit de son séjour à Rome, à la Villa Medicis où elle fut pensionnaire il y a une dizaine d’années. « Quand je suis arrivée, j’étais impressionnée, je me suis demandée comment faire quelque chose dans un lieu aussi marqué », se souvient l’artiste. Elle est donc partie à la rencontre des petites mains qui font tourner l’institution, « ceux qui sont là depuis toujours, de génération en génération. » Dans les appartements où logeait Balthus, il livre une étourdissante série de Natures mortes avec des aliments fournis par le cuisinier de la villa. Avec la même puissance, elle présente une vision décalée de la ville de Rome. Se promenant au petit matin, elle découvre « des sans-abri allongés au seuil de lieux prestigieux, devant les grandes portes des églises… » Elle les photographie puis retourne à la rencontre de ces Invisibles, regardés sans aucun misérabilisme, en contraste de cette « ville baroque et opulente. »

Jusqu'au 31 décembre 2018. Musée Réattu, 10 rue du Grand Prieuré, Arles. 8€, 6 €. 04 90 49 37 58.

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