Nîmes : voyage vers Pompéi au musée de la Romanité
Le musée de la Romanité à Nîmes évoque la vie et la disparition de la cité de Pompéi.
Figée par l’éruption du Vésuve, la cité de Pompéi est sans doute le site antique le plus émouvant de l’ancien empire romain. C’est ce voyage dans le temps que donne à voir l’exposition “Pompéi, le récit oublié”, présentée par le musée de la Romanité à Nîmes, après des escales à Sydney et Hong Kong. Même si l'accrochage joue parfois inutilement avec le spectaculaire : l'exposition réunit des pièces remarquables, qui n'avaient guère besoin de vidéos et d'outils plus divertissants qu'informatifs.
Avant de dévoiler la richesse du patrimoine qui a traversé les siècles, l’exposition débute par le contexte politique et militaire, avec notamment une statue de l’empereur Titus au pouvoir au moment où la ville a été ensevelie. Le premier protagoniste du récit est Pline l’Ancien, qui a tenté de venir en aide aux victimes. A la tête de la flotte de Misène, il arme douze bateaux pour organiser les secours. La puissance de Rome repose en grande partie sur sa flotte, qui lui a permis de conquérir la Méditerranée. Un éperon naval, mais aussi l’inscription funéraire d’un marin ou le diplôme d’un militaire témoignent de cette politique, engagée dès les guerres puniques. Cela va permettre à Rome d’asseoir sa domination militaire, mais également de développer un commerce florissant dont vont profiter des villes moyennes comme Pompéi. Installée dans une zone prospère, la cité ne se distingue par particulièrement des villes équivalentes, mais la catastrophe va lui permettre de passer à la postérité.
Au centre de l’exposition, les objets trouvés sur place, notamment dans les riches demeures, montrent un art de vivre particulièrement raffiné. Dans les jardins des villas, ont été découverts de grandes statues, notamment un beau Bacchus ou un petit Satyre.
Mais les objets de la vie quotidienne sont également remarquables. Une simple passoire peut s’orner de décors raffinés, tout comme un grand samovar. Les statuettes de bronze participent aussi à ce mode de vie luxueux. Ils ont traversé 2 000 ans dans un incroyable état de conservation, tout comme les fresques qui décoraient les maisons. Seule une peinture érotique a fait le voyage jusqu’à Nîmes, dommage pour les coquins…
De menus objets racontent aussi ce quotidien, des restes de repas carbonisés, des figues, des noyaux de pêches, grains de blé ou d’orge, mais aussi de simples clés, trouvées non loin des corps des victimes qui avaient fermé leur porte et pris la fuite en pensant pouvoir rentrer chez eux.
Car l’histoire s’achève, on le sait, tragiquement… À l’époque le Vésuve ne s’était pas manifesté depuis des siècles, il était couvert de végétation et tout le monde avait oublié son danger. Un bas-relief évoque pourtant le tremblement de terre de l’année 62 qui avait secoué la région et qui étaient sans doute lié à l’activité souterraine annonçant la catastrophe. Quand le Vésuve entre en éruption, les villes de Pompéi et d’Herculanum sont ensevelies jusqu’au XVIIIe siècle. Sur les 20 000 habitants, beaucoup parviennent à fuir. Certaines personnes, sans doute mortes asphyxiées, sont prises dans la lave. Au moment des fouilles, les archéologues coulent du plâtre dans les cavités et retrouvent les formes des corps. Ces moulages, pièces absolument bouleversantes, achèvent le récit dans les lumières rougeoyantes qui ont surpris les habitants et qui continuent, aujourd’hui, à effrayer comme au matin du 24 août 79.
Pline l'Ancien et Pline le Jeune
Deux personnages servent de fil conducteur à l’exposition. D’abord Pline l’ancien, militaire féru de science installé à Misène, qui voit la colonne de fumée de plusieurs kilomètres de fumée s’élever de l’autre côté de la baie de Naples. Avec douze quadrirèmes, il se dirige vers le Vésuve. Son entreprise sera un échec en raison des vents et de la pluie de cendres. Il meurt le lendemain sans que l’on sache s’il a réussi à sauver quelques personnes.
La ville comptait environ 20 000 habitants à l’époque, seuls 1 150 corps ont été retrouvés sur place. Une grande partie de la population a réussi à s’échapper. Ce que l’on sait de cet épisode tragique provient notamment de deux lettres écrites par le neveu du militaire, Pline le jeune, évoqué à la fin de l’exposition. Il y raconte de façon saisissante la catastrophe et la tentative de Pline l'Ancien :
« Il se pressa d'arriver au lieu où tout le monde fuyait, et où le péril paraissait plus grand ; mais avec une telle liberté d'esprit, qu'à mesure qu'il apercevait quelque mouvement ou quelque figure extraordinaire dans ce prodige, il faisait ses observations et les dictait. Déjà sur ces vaisseaux volait la cendre plus épaisse et plus chaude, à mesure qu'ils approchaient ; déjà tombaient autour d'eux des pierres calcinées et des cailloux tout noirs, tout brûlés, tout pulvérisés par la violence du feu ; déjà la mer semblait refluer, et le rivage devenir inacessible par des morceaux entiers de montagnes dont il était couvert.
« (...) Cependant on voyait luire, de plusieurs endroits du mont Vésuve, de grandes flammes et des embrasements dont les ténèbres augmentaient l'éclat. Mon oncle, pour rassurer ceux qui l'accompagnaient, leur disait que ce qu'ils voyaient brûler, c'étaient des villages que les paysans alarmés avaient abandonnés, et qui étaient demeurés sans secours. »
Jusqu'au 6 octobre 2019. Tous les jours, 10 h-19 h. Musée de la Romanité, 16 boulevard des Arènes, Nîmes. 8 €, 6 €, 3 € - 17 ans, gratuit - 7 ans.