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Marseille : le regard dévastateur de Dubuffet au Mucem


Passionnant regard sur l'oeuvre de Jean Dubuffet au Mucem à Marseille à travers son rapport aux arts populaires. L'exposition sera ensuite présentée à l'automne 2020 au Musée d'ethnographie de Genève

Plutôt qu'une sage rétrospective, l'exposition "Jean Dubuffet, un barbare en Europe" que propose le Mucem à Marseille (qui sera ensuite accueillie à Valence, en Espagne puis à Genève, en Suisse), montre avec près de 300 oeuvres toutes les multiples facettes d'un regard dévastateur. Car avant d'être un peintre, un sculpteur ou un théoricien, Jean Dubuffet est avant tout un homme qui regarde le monde différemment, qui met le bon goût sens dessus dessous, qui culbute l'asphyxiante culture, les hiérarchies, les verticalités, les académismes qui s'affichent en avant-gardes, qui puise dans les sciences humaines et les pratiques vernaculaires autant que dans l'histoire de l'art.

L'exposition se situe dans le sillage de plusieurs présentations du Mucem explorant les relations entretenues par les artistes de la modernité avec les arts populaires et poursuit une réflexion passionnante et salutaire pour nettoyer le regard, comme l'aurait dit Jean Dubuffet.

L'oeuvre de Jean Dubuffet est un vaste décloisonnement. Quand il rencontre Lili Carlu, amie de Kiki de Montparnasse, au début des années 1930, il a déjà une solide technique comme le montre une toile étonnante de ses débuts méconnus. On peut déjà repérer le goût pour le cerne noir qu'il utilisera ensuite de façon très différente... Avec elle, il découvre les arts populaires. Elle l'encourage et il la représente comme une marionnette.

Au fil des années, Jean Dubuffet fréquente aussi les surréalistes André Breton et Paul Eluard, côtoie Georges-Henri Rivière, le fondateur du Musée des arts et traditions populaires, ancêtre du Mucem. Les curiosités de l'artiste sont multiples et il se nourrit de tout. En refusant les conventions, il découvre l'art brut produit par les fous, les paysans ou les prisonniers. L'exposition présente notamment des oeuvres anciennes collectées par Dubuffet lui-même et aujourd'hui conservées à Lausanne, notamment les assemblages d'Auguste Forestier. Mais il s'intéresse aussi à l'ailleurs, au lointain, dans le sillage de recherches ethnologiques de Claude Levi-Strauss, aux dessins d'enfant, aux cornes gravées par les bergers, aux outils des vanniers, aux graffitis, aux grottes pariétales ou aux dessins des nomades du Sahara. Redéfinissant les limites de l'art généralement admises en Occident, il peint, sculpte sans se soucier des normes en vigueur.

Les paysages ou les êtres humains qu'il représente échappent à toute idée de beauté ou d'esthétique. Dubuffet préfère le quotidien, la vie frénétique des villes et du métro, les champs dans les campagnes. Il peint le sol sans perspective, crée des livres où il rebat aussi les cartes de la langue, présente des figures grotesques, une Vénus du trottoir ou les personnages de l'Hourloupe, en abattant toute position de surplomb des idéologies primitivistes.

Avec un accrochage volontiers labyrinthique, l'exposition ne se contente pas de dérouler l'oeuvre de Dubuffet, mais véritablement de plonger au coeur d'un esprit foisonnant, d'une recherche sans cesse neuve, d'une curiosité insatiable pour l'autre, pour l'homme qu'il vive dans un asile, au coin de la rue ou à l'autre bout du monde. « Ce n'est pas être un homme d'exception qui est merveilleux. C'est d'être un homme », professait-il.

Jusqu'au 2 septembre. Du mercredi au lundi, 11 h à 19 h. Mucem, 7 promenade Robert Laffont, esplanade du J4, Marseille. 9,50 €, 4 €. 04 84 35 13 13.


Du 8 septembre 2020 28 février 2021. Du mardi au dimanche, 11 h à 18 h. Musée d'ethnographie de Genève, boulevard Carl-Vogt 65, Genève. 9 CHF, 6 CHF, gratuit - 18 ans. +41 22 418 45 50.

 

Parallèlement à l'exposition du Mucem, le galerie Polysémie, installée près du musée et de la cathédrale de la Major, consacre une exposition à André Robillard. Né en 1931, près d'Orléans, il est le dernier des représentants de l'art brut collectionné par Jean Dubuffet encore vivant. Connu notamment pour ses fusils bricolés, André Robillard a été placé dans une école annexe à un hôpital psychiatrique dès l'enfance. Il y a passé sa vie, comme malade, puis comme employé.

Jusqu'au 25 mai. Mardi au dimanche, 14 h-18 h. Galerie Polysémie, 12 rue de la Cathédrale, Marseille. Entrée libre. 04 91 19 80 52.

L'exposition sera ensuite présentée à l'Ivam, Institut Valencia d'Art Modern, du 8 octobre 2019 au 16 février 2010.


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