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Le Vigan : "Que reste-t-il ?" Regards contemporains sur la Retirada


Dans le cadre du cycle "Je suis étranger" initié par Les Abattoirs, la ville du Vigan, en Cévennes, accueille deux expositions évoquant la mémoire de la Retirada et de la guerre d'Espagne.

En 1939, devant la défaite des Républicains espagnols, des milliers de civils traversaient les Pyrénées pour venir s’installer en France. Cette histoire, la Retirada, a laissé de nombreuses traces dans la région Occitanie. Tout l’été, le Fonds régional d’art contemporain Les Abattoirs de Toulouse présente un vaste cycle d’expositions, “Je suis né étranger” pour commémorer les 80 ans de l’événement.

Dans le Gard, Le Vigan accueille “Que reste-t-il ?”, deux expositions pleines d’émotion, montrant l’universalité de cette histoire d’exil, de combat et de mémoire. Originaire de Daghestan, république du Caucase, Taus Makhacheva signe avec Tightrope, une vidéo saisissante présentée en 2017 à la biennale de Venise. Entre deux montagnes, dans un vaste environnement désertique, un funambule transporte d’un sommet à l’autre des œuvres du musée des beaux-arts du Daghestan, faisant voyager dans le ciel la mémoire d’un peuple et sa culture, dans un contexte douloureux.

Depuis des années, toute velléité identitaire dans le Caucase est violemment réprimée par la Russie. À travers la figure de cet athlète, l’artiste rend aussi hommage à une tradition de son pays, qui séduit aujourd’hui les Occidentaux à travers la mode de la highline.

L’artiste Paula Anke, installée en Cévennes, travaille l’histoire et l’intime. Avec ses Collecteurs de mémoire, elle construit de petits reliquaires précieux et délicats, où se mélangent tissus, bijoux ou jouets, éclairés par un texte sur les secrets de famille. Ses Amazones de l’ombre flottent au milieu de la pièce, petites figurines féminines en costumes de toutes origines.

Avec Rencontre, réalisée cette année, Paula Anke invite à traverser une installation labyrinthique, à frôler les vêtements suspendus avant de découvrir les visages de ceux qui les ont portés. En fond sonore, Ain't got no, I got life de Nina Simone souligne le désespoir mais aussi la soif de vivre de ceux qui n'ont plus rien que le vide devant eux.

L’exposition se poursuit au musée Cévenol, avec Daniel G. Andujar, exposé également en ce moment à Carré d’art à Nîmes, dans le cadre du Grand Arles Expess. Dans ce musée où plane la mémoire André Chamson, l’un de ceux qui ont sauvé les chefs-d’œuvre du Louvre pendant la Seconde Guerre mondiale, l’artiste espagnol s’empare de la question de la conservation des tableaux pour évoquer la guerre d’Espagne.

Avec Hacked Guernica, il met en scène une reproduction du tableau de Picasso, énorme rouleau destiné à voyager pour défendre à travers le monde la République espagnole. Peint initialement pour le pavillon espagnol de l'Exposition universelle, le chef-d'oeuvre avait ensuite entamé une longue transhumance, s'arrêtant longtemps à New York, avant de regagner Madrid après la fin de la dictature de Franco, selon les dernières volontés de l'artiste.

Dans Hacked Monumento a los españoles muertos por Francia, il présente l’impression digitale, recto verso, de la toile de Picasso célébrant le courage des exilés espagnols engagés dans la Résistance. Léguée à la France par Jacqueline, la veuve de Picasso, elle a été donnée à l’Espagne par le président Mitterrand.

Dans La révolution est inutile, Andujar crée une vidéo qui recourt à l’esthétique des jeux vidéos. Dans une ville en ruine, les hommes se battent au milieu d’œuvres d’art menacées par les balles et les explosions des bombes. Dans ce champ de bataille, les œuvres sont celles qui ont fait partie du plan de sauvetage du Prado en 1939, quand les Velasquez, Bosch, Rubens et Goya ont eux aussi traversé les Pyrénées pour partir à Genève. Un peu oubliée cette histoire est la première mobilisation internationale pour mettre à l’abri des biens culturels lors de conflits armés. Hélas pas partout…

Jusqu'au 22 septembre. Château d'Assas, 11 rue des Barris et musée Cévenol, 1 rue des Calquières, Le Vigan. 04 67 81 06 86.


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