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Arles : "It's urgent", les désordres du monde à l'affiche de la fondation Luma

La fondation Luma à Arles accueille un projet imaginé par Hans-Ulrich Obrist, la star des curators, invitant les artistes contemporains à produire des affiches.

Impossible pour la fondation Luma à Arles de passer un été sans exposition. « On ne pouvait pas se résoudre à ne rien faire. C’est important d’être là, de montrer notre engagement », explique Mustapha Bouhayati, directeur de la fondation. Les Rencontres de la photographie sont annulées, mais au pied de la tour en chantier de Frank Gehry, “It’s Urgent” clame à la fois la passion de l’art contemporain et son importance pour interroger le monde en crise.

La première version du projet est née au Danemark, au moment des dernières élections européennes. Piloté par Hans-Ulrich Obrist, complice de la mécène Maja Hoffmann et directeur des Serpentine Galleries de Londres qui possède sans doute l’un des plus beaux carnets d’adresses de la scène contemporaine, il invitait des artistes à produire des posters pour susciter l'engagement. Le projet se déploie désormais à Arles, installé dans le bâtiment du médico-social qui ouvre ses portes pour la première fois au public, complété par de nouvelles propositions et appelé à se développer encore au cours de l’été. Une centaine d’affiches étaient déjà collées pour l’ouverture. « Leur contribution dessinera le portrait intime du mouvement des idées et des préoccupations qui caractérisent la période que nous vivons », explique Maja Hoffmann.

« C’est un médium dont les artistes ne sont pas familiers mais qui permet de faire entrer le message de manière immédiate », poursuit Vassilis Oikonomopoulos, qui vient de quitter la Tate pour rejoindre l’aventure Luma à Arles. A partir de posters, tous de la même taille, les créateurs s'emparent de façon directe, frontale des problèmes d'aujourd'hui, avec une volonté d'aller droit au but, tout en conservant la distance et le style qui leurs sont propres.

Qu’est-ce qui est urgent aujourd’hui ? Au fil des affiches, les images, les dessins, les photos et les textes se mélangent pour évoquer de façon militante les questions sociales, environnementales, les droits humains, les problèmes migratoires... La liste des participants est impressionnante, mélange les origines, les disciplines, les générations. Certains manient l'humour, d'autres la poésie ou la dénonciation. Parmi eux, Ai Weiwei, Annette Messager, Anri Sala, Brian Eno, Carsten Holler, David Lynch, Etel Adnan, Jacques Villeglé, Sophie Calle, Jenny Holzer, Mark Bradford, Olafur Eliasson, Oscar Murillo, Paul B. Preciado, Rachel Rose, Yoko Ono, Cao Fei, Antonio Caro, Zanele Muholi, Judy Chicago, Douglas Coupland, Jimmie Durham, Liam Gillick, Jean-Luc Godard, Beatriz Gonzalez, Dominique Gonzalez-Foerster, Pierre Huyghe, Amar Kanwar, Tomas Saraceno, Martine Syms, Stephen Shore, Wolfgang Tillmans, Lawrence Weiner ou Huang Yong Ping, dont l'affiche est la dernière oeuvre.

L'accrochage épouse le propos, avec une économie de moyens qui n'enlève rien à la force de l'exposition, bien au contraire. Jouant sur différents registres, la proposition est à la fois exigeante et accessible, esthétiquement comme intellectuellement. Dans un bâtiment inachevé, les affiches simplement collées au mur dessinent les contours d'un monde en danger, menacé de tout part mais qui a désormais un diagnostic fiable et quelques idées pour éviter le cataclysme. Le présent et l'avenir sont ouverts. En chantier comme ces murs...

 

Peter Fischli et David Weiss

Parallèlement, la fondation Luma présente la vidéo absolument géniale du duo Peter Fischli David Weiss, Le cours des choses, oeuvre historique qui prend un sens très particulier dans la situation actuelle. Pendant une demi-heure, les artistes filment une série de catastrophes en chaîne, de petites explosions et de grands dérapages. Les images sont à fois surréalistes par leur humour et leur absurdité, une illustration visuelle de l'effet papillon et la métaphore d'un monde où la situation sanitaire d'un marché aux poissons peut conduire au confinement général de la planète.

Mais l'espoir est là, avec sa beauté et son soleil. Avec Untitled (2018), la courte vidéo de Peter Fischli, en solo depuis la mort de David Weiss en 2012. Dans le champs des cigales, l'artiste filme, avec simplicité, la sensation de la lumière en plein été.

Jusqu’au 27 septembre. Tous les jours, 11 h à 19 h. Fondation Luma, parc des ateliers, 33 avenue Victor-Hugo, Arles. Gratuit. 04 90 47 76 17. 


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