Le Vigan : Anne-Lise Coste face aux Lumières, siècle libertin et liberticide
Une variation féministe et contemporaine d'Anne-Lise Coste autour de l'héritage des Lumières à découvrir au château d'Assas, centre d'art du Vigan dans le Gard.
Le titre de son exposition est très clair : “Bazooka”. Quand il s’agit d’attaquer, Anne-Lise Coste n’a peur de rien, ni des armes lourdes, ni des fleurets mouchetés, ni surtout d’utiliser son art. Au Château d’Assas au Vigan, dans le Gard, l’artiste, exposée récemment au Crac à Sète ou à la fondation Salomon d’Annecy, interroge l’esprit des Lumières, qui étale ici sa splendeur dans les moulures et l’architecture du château. Car si le XVIIIe siècle est celui des philosophes et de l'Encyclopédie, il est aussi celui du marquis de Sade et plus insidieusement peut-être, celui d’une oppression charmante comme dans les tableaux de Boucher ou de Fragonard.
Dans son accrochage, l’artiste laisse d’ailleurs les murs nus, présentant le château dans toute sa dimension fantasmatique, « pour lui rendre sa dramaturgie libertine et liberticide », explique Laurent Puech, commissaire de l’exposition. Mais au centre d’un salon, elle pose de façon très directe la question très actuelle du consentement, avec un matelas plié où elle dépose une toile Say yes to me (dis-moi oui).
Anne-Lise Coste est à la fois révoltée et joyeuse. Son propos est rude, souvent de façon décapante, mais souvent avec humour. L’écriture tient une place particulière dans son œuvre. Elle utilise les mots à la fois pour leur poésie, leur sens et leur puissance plastique. Dans une autre pièce, elle présente About a girl (À propos d’une fille). Sur huit plaques de contreplaqués, voici une écriture sans mot. Avec les doigts et de la peinture à l’huile noire, elle laisse des traces, des griffures, comme une prière et un cri de révolte, comme des mains qui s’accrochent à une paroi pour se débattre et échapper à leur sort. Les planches sont simplement éclairées par une ampoule nue, posée au sol, accrochée au bout d’un fil électrique. En écho, dans un coin de la pièce, sur une modeste plaque de terre crue, elle grave les mots La Haine.
Dans la dernière pièce, elle retrouve les mots dont elle couvre parfois les murs, comme le montre Nothing Compares To You, son intervention dans le parc du château. Sur les toiles de la série J’ai une activité sexuelle satisfaisante, elle aligne les phrases qui suivent le trauma, des formules toutes faites comme celle qu’on pourrait voir dans un téléfilm pour une séance face à une assistante sociale, comme celles qu’on peut lire dans les manuels de développement personnel censés soigner les petits bobos et les grandes brûlures.
Avec ces phrases tracées à l’aérographe, il y est question de sexualité, d’appétit, de résilience, de nervosité, de prise de décision. Avec un mélange de spontanéité et d’élégance, il s’agit surtout pour l’artiste de s’approcher au plus près d’une forme de vérité à la fois intime et non pas universelle, mais qui prend prend son sens dans la relation à l’autre.
Jusqu’au 7 février. Lundi au vendredi, 10 h 30-12 h et 14 h-17 h. Château d’Assas, 11 rue des Barris, Le Vigan. Entrée libre. 04 99 64 26 62.
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