Nîmes : Ettore Favini suit le fil du jean à travers la Méditerranée
Une variation autour de l'histoire de la Méditerranée par le plasticien italien à Carré d'art, à Nîmes.
En Égypte, dans le sable du désert, les archéologues ont retrouvé des tissus comparables à la fameuse toile Denim. C’est à partir de cette découverte, que le plasticien italien Ettore Favini s’est lancé dans “Au revoir”, une recherche au long cours autour du jean et la mer Méditerranée, un travail entamé en 2015 et dont la quatrième étape est présentée aujourd’hui au musée d’art contemporain Carré d’art à Nîmes.
L’artiste mélange l’histoire individuelle et collective autour de ce continent liquide, parcouru par des fils invisibles qui relient les villes du Caire, de Gênes, de Chieri et de Nîmes. Pour Ettore Favini, la chaîne et la trame du tissage, les fils qui s’entrecroisent, symbolisent les liens et les échanges qu’il révèle à travers ses œuvres.
L’artiste s’est associé à des femmes réfugiées, venues d’Égypte et du Maroc, avec lesquelles il s’est engagé dans un projet à la fois social et culturel. Sur des grandes toiles de jean, dont les ondulations évoquent les vagues de la mer, elles brodent des cartes, depuis la plus ancienne représentation d’Aniximandre du Minet au septième siècle avant Jésus-Christ jusqu’aux cartes fournies aujourd’hui par les satellites et Google Maps. Sur une grande toile, la superposition des cartes compose une œuvre abstraite, matérialise les différentes strates temporelles de cet espace naturel mais aussi façonné par les échanges de population, de marchandises, les flux économiques ou touristiques. La Méditerranée n’est pas vue de la même manière selon que l’on est au Sud ou au Nord, selon que l’on est touriste ou marin, selon que l'on vit dans un monde pacifié ou en conflit.
Une série de cyanotypes sur tissu, un ancien procédé de tirage photo donnant des images bleues, permet de redécouvrir ces représentations. Alignées au mur, les images montrent l'évolution des regards, au coeur d'un accrochage sobre.
Car le jean permet de retracer une histoire de la Méditerranée qui en réunit toutes les dimensions, la géographie, le commerce, les mythologies, les populations... Une voile latine, dont la forme a traversé les siècles, brodée par les réfugiées, assemble différentes étoffes appartenant à ces femmes, y compris le voile qu’une femme a quitté en arrivant en Europe.
Sur les murs du musée, Ettore Favini fait voguer des bateaux des différentes époques sur des flots bleus comme la mer, bleus comme le jean, ce pantalon qu’il transforme en sculpture de bronze. Comme le montre Ettore Favini, cette toile a traversé les temps et peu à peu, en parallèle, les navires romains et les galions ont été remplacés par les porte-conteneurs et les zodiacs des migrants qui meurent aujourd’hui en essayant de passer d’une rive à l’autre.
Exposition prolongée jusqu'au 31 octobre. Mardi au dimanche, 10 h-18 h. Carré d’art, place de la Maison-Carrée, Nîmes. 5 €, 3 €. 04 66 76 35 70.
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