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Nîmes : les couleurs exaltées de René Seyssaud au musée des Beaux-arts

Passionnante rétrospective du paysagiste provençal René Seyssaud au musée des Beaux-arts de Nîmes.

« René Seyssaud n’était ni impressionniste, ni fauve. Il refusait tous les -ismes et n’a exposé qu’au salon des indépendants », explique Pascal Trarieux, conservateur du musée des Beaux-arts de Nîmes qui consacre une vaste rétrospective au paysagiste provençal. Après le succès de l’exposition Auguste Chabaud en 2018, il continue à creuser cette veine, avec une peinture qui ignore à la fois les modes et les académismes.

Né en 1867 à Marseille, mort à Saint-Chamas, sur les rives de l’étang de Berre en 1952, René Seyssaud fait partie de cette génération marquée par l’enseignement de Pierre Grivolas à l’école des Beaux-arts d’Avignon qui, dans la lignée des impressionnistes, fait sortir ses élèves de l’atelier pour aller peindre au grand air, sur le motif, dans le vent et sous le soleil.

Contrairement à une idée répandue, René Seyssaud n’est pas un fauve ou un précurseur du fauvisme. « Il a une approche plus naïve. Il exalte la couleur, il force le ton, mais uniquement des couleurs qu’il voit, il ne les modifie pas intellectuellement à la recherche d’un effet, poursuit le conservateur. Notre cerveau corrige ce que l’on voit », mais les ombres bleues des montagnes à la fin du jour existent dans la réalité. « C’est un exercice du regard. »

Esthétiquement, « il y a deux expressions qui l’intéressent, poursuit Pascal Trarieux. Suivant la leçon des Nabis, c’est la couleur en aplats qui détermine les formes. Ensuite, il y a l’importance des estampes japonaises. Il en possédait. Il a une notion très graphique du cadrage, il coupe les scènes ».

Dès les premières toiles à la fin du XIXe siècle, dans les paysages de Provence, il affirme son style. « Il pose son chevalet très près du sol, il peint presque assis par terre pour avoir des vues en contre-plongée. La ligne d’horizon n’est pas à la hauteur du regard, mais en haut du tableau », précise Pascal Trarieux.

De même, il joue avec une succession de plans, « un procédé cinématographique » qui permet de donner de la profondeur. René Seyssaud peint même à contre-jour, avec les ombres au premier plan.

Avec une vivacité impressionnante, il évite le détail, synthétise le paysage, par exemple avec Les Oliviers, tableau prêté par le musée d’Orsay. René Seyssaud utilise la touche épaisse, non pas dans une veine expressionniste, mais pour donner de la densité, du volume aux nuages des ciels intenses, à l’herbe aux pieds de l’impressionnant Faucheur prêté par le musée d’Albi ou à l’écume des paysages maritimes. Au fil des oeuvres, on voit que Seyssaud a aussi observé certains peintres, Van Gogh ou Gauguin notamment. Il s’intéresse aux couleurs vives, aux ocres de Provence, au rose des sainfoins, au jaune des moissons, au soleil qui frappe le cap Canaille à Cassis. Même son dernier autoportrait conserve cette franchise du regard, se représentant plus comme un vieux berger que comme un artiste célébré.

Jusqu'au 17 janvier 2021. Mardi au dimanche, 10 h à 18 h. Musée des Beaux-arts, rue Cité-Foulc, Nîmes. 5 €, 3 €. 04 66 76 71 82.

 

René Seyssaud et les collectionneurs nîmois Un peu oublié aujourd’hui, le peintre René Seyssaud a eu beaucoup de succès à son époque, il faisait partie des prescriptions des décorateurs à la mode et ses oeuvres sont conservées dans plusieurs grands musées. D'après Claude-Jeanne Sury-Bonnici, spécialiste du peintre qui lui a consacré une thèse, il a peint environ 5 000 oeuvres au fil de sa longue carrière.

Les recherches menées autour du peintre en amont de l’exposition ont permis d’identifier à Nîmes plusieurs collectionneurs fervents de son œuvre, notamment le brasseur Jean Martel qui avait fait fortune grâce à la fabrication électrique de la glace, possédait une voiture de sports qui avait gagné les 24 heures du Mans, des tableaux de Vlaminck, Kiesling, Marquet, Modigliani. Le peintre était également soutenu par Frédéric Paulhan, le père de Jean Paulhan, philosophe qui le cite dans L’Esthétique du paysage ainsi que par un Nîmois brillant et totalement oublié, Léonce Bénédite, conservateur du musée du Luxembourg grâce auquel la France n’est pas passée totalement à côté du legs Caillebotte. Le musée de Nîmes possède également une toile du peintre, entrée dans les collections grâce à Gaston Bouzanquet qui avait collecté des œuvres pour ouvrir au musée de Nîmes une salle d’art moderne, avec une toile de Foujita, de Chabaud ou des artistes de l’école d’Avignon…

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