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Sur la piste... Le palais idéal du facteur Cheval


Visite du Palais idéal du facteur Cheval, chef-d'oeuvre de l'art brut, à Hauterives dans la Drôme.

Qu'est-ce qui peut bien pousser un homme à traîner tous les jours pendant plus de trente ans des cailloux et du ciment pour construire une gigantesque monument naïf et baroque de 26 mètres de long et 12 mètres de haut ? Entre 1879 et 1912, Ferdinand Cheval, facteur de son métier, a patiemment donné corps à un rêve, un palais, seul chef-d'oeuvre architectural de l'art brut, classé monument historiques depuis 1969 grâce à l'engagement d'André Malraux.

Situé à Hauterives, dans la Drôme, le Palais idéal est un hymne à la nature et à la connaissance, plein de références aux mythologies et à la Bible. Il évoque à la fois le parcours d'un homme mais aussi une époque, celle d'une première ouverture au monde grâce aux illustrés et aux conquêtes coloniales, où s'entrecroisent des citations des grandes civilisations avec une ambition humaniste, dans un fourmillement de détails, de sculptures, de figures, d'animaux.

Pour découvrir l'histoire de cette passion, rien de mieux après la visite que le film que lui a consacré le réalisateur Nils Tavernier et surtout le livre qu'il a publié chez Flammarion. Malgré une vie difficile, marquée par de nombreux deuils, le facteur Cheval est allé au bout de son rêve, patiemment et avec acharnement depuis qu'il a buté sur une pierre étrange, qui trône toujours au centre de son palais.

Né en 1836 dans une famille de paysans, Ferdinand Cheval débute comme boulanger, puis comme ouvrier agricole. En 1867, il entre dans l'administration des postes, affecté à partir de 1869 à Hauterives. C'est là, que chaque soir, après une tournée de trente kilomètres propice à la rêverie, il construit à partir de 1879 son palais imaginaire.

« Un jour du mois d'avril en 1879, raconte-t-il dans ses carnets, en faisant ma tournée de facteur rural, à un quart de lieue avant d'arriver à Tersanne, je marchais très vite lorsque mon pied accrocha quelque chose qui m'envoya rouler quelques mètres plus loin, je voulus en connaitre la cause. J'avais bâti dans un rêve un palais, un château ou des grottes, je ne peux pas bien vous l'exprimer… Je ne le disais à personne par crainte d'être tourné en ridicule et je me trouvais ridicule moi-même. Voilà qu'au bout de quinze ans, au moment où j'avais à peu près oublié mon rêve, que je n'y pensais le moins du monde, c'est mon pied qui me le fait rappeler. Mon pied avait accroché une pierre qui faillit me faire tomber. J'ai voulu savoir ce que c'était… C'était une pierre de forme si bizarre que je l'ai mise dans ma poche pour l'admirer à mon aise. Le lendemain, je suis repassé au même endroit. J'en ai encore trouvé de plus belles, je les ai rassemblées sur place et j'en suis resté ravi… C'est une pierre molasse travaillée par les eaux et endurcie par la force des temps. Elle devient aussi dure que les cailloux. Elle représente une sculpture aussi bizarre qu'il est impossible à l'homme de l'imiter, elle représente toute espèce d'animaux, toute espèce de caricatures.

« Je me suis dit : puisque la Nature veut faire la sculpture, moi je ferai la maçonnerie et l'architecture. »

Pour les gens du village, il passe rapidement pour un fou, mais Ferdinand Cheval continue et à la fin de sa vie, il recevra des visiteurs, fera éditer des cartes postales... Ne pouvant être inhumé dans son palais comme il le souhaitait, il poursuivra son aventure avec la construction de son tombeau dans le même style au cimetière du village.

Il meurt en août 1924, à 88 ans, un âge canonique pour l'époque. Depuis la curiosité et l'admiration pour son travail n'ont cessé de grandir, recevant les hommages d'artistes aussi différents que Picasso, Niki de Saint-Phalle, André Breton, Max Ernst ou Boris Vian.

La visite du palais est une plongée dans l'imaginaire foisonnant du facteur, juste à côté de la modeste maison où il habitait et d'un espace muséal qui permet de redécouvrir son histoire.

Le facteur débute sa construction par la façade est, avec au centre la source de vie. Il poursuit avec la grotte de Saint-Amédée, Socrate, le temple égyptien et de l'autre côté un temple hindou, puis les trois géants, César, Archimède et Vercingétorix. Au sud, il construit un musée antédiluvien où il présente les pierres qui lui tiennent particulièrement à coeur. A l'ouest, il montre sa vision universaliste et il fait cohabiter les cultures et les religions : une mosquée, un chalet suisse, un château médiéval, la mison carrée d'Alger... Enfin au nord, sans doute la façade par laquelle le facteur Cheval achève sa construction, il fait cohabiter sous l'oeil d'Adam et Eève, des animaux réels ou mythologiques, serpents, biche, grenouille, Phénix ou minotaure...

Tous les jours, sauf le 25 décembre, le 1er janvier et du 15 au 31 janvier. Janvier, décembre, 9 h 30-16 h 30. Février, mars, octobre, novembre, 9 h 30-17 h 30. Avril à juin, septembre, 9 h 30-18 h 30. Juillet, août, 9 h 30-19 h. Palais Idéal du Facteur Cheval, 8 rue du Palais, Hauterives. 8 €, 6 €, 5 € enfants, gratuit - 6 ans. 04 75 68 81 19.

Pour aller plus loin :

Interview de Nils Tavernier : "Le facteur Cheval est un héros de cinéma"

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