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Avignon : "Notre musée", l'art et la vie à la Collection Lambert

Un projet singulier à la Collection Lambert à Avignon, réunissant objets intimes de personnes en difficulté sociale et oeuvres d'art contemporain.

Qu'est-ce qu'un musée ? Qu'est-ce qu'une collection ? Pourquoi accorde-t-on de la valeur à une œuvre ou à un objet ? Pourquoi les conserver, les protéger ? Quelle est leur valeur ? Pourquoi exposer ? Pourquoi s'exposer ? Autant de questions soulevées par le projet singulier que propose la Collection Lambert à Avignon, fruit d'un travail social au long cours et présentant un musée à la première personne, du singulier et du pluriel.

L'exposition a été pensée dans le cadre du festival "C'est pas du luxe" qui invitait cette année l'artiste Mohamed El Khatib. L'événement fait se rencontrer institutions culturelles et personnes en difficulté sociale. Le projet "Notre musée" a commencé par une séance où les participants ont été invités à venir avec un objet qui leur est cher, constituant une première galerie intime. Puis, ils ont visité les réserves de la Collection Lambert, d'autres musées de la région... Peu à peu, les histoires se sont entremêlées. Certains objets ont trouvé place dans le salon des refusés... D'autres sont venus s'ajouter, prêtés par les travailleurs sociaux ou les personnels du musée. Avec d'autant plus de pertinence que la collection du galeriste Yvon Lambert est aussi le fruit de relations affectives et amicales avec les artistes, qu'elle est parsemée de souvenirs personnels, de cadeaux et de clins d'œil. Impossible de ne pas penser à la fameuse phrase de Robert Filliou : « L'art est ce qui rend la vie plus intéressante que l'art. »

En prélude à la présentation, Thomas Hirschhorn réactive son Sas de contamination. Il a travaillé trois semaines avec des collégiens, des lycéens, des étudiants pour reconstituer ce labyrinthe d'immersion artistique. Avec une pratique poreuse au monde extérieur, il réfute les hiérarchies. Dans un grand carambolage à l'esthétique punk, les images d'actualité, les petits objets kitsch et les icônes de l'histoire de l'art se trouvent mêlées dans un joyeux bazar, enchaînés, sans qu'on sache s'ils sont emprisonnés ou protégés.

Après cette installation spectaculaire et débordante d'énergie, l'exposition prend le chemin de l'intime. Un transistor est la seule chose récupérée par un participant dans la maison de sa mère à Tanger. À l’intérieur, il y avait une cassette d'Oum Kalthoum. Il ne l'a jamais réécoutée. Comme par magie, Zilvinas Kempinas fait tournoyer à côté une bande magnétique et dans le silence, le visiteur retrouve cette voix envolée. Au fil de la présentation, les rapprochements sont formels, thématiques, personnels ou conceptuels. Des objets historiques des fonds du Mucem à Marseille ou de l'hôtel Agar à Cavaillon viennent compléter le projet. Et chacun se retrouvent dans ces histoires.

Une pièce de cinq francs trouée, qui accrochée à un fil de pêche, permettait de téléphoner à volonté dans une cabine téléphonique des années 80. Un ouvre-boîte pour gaucher acheté par erreur par un fils mort dans un accident de voiture. La valise d'un ancien militant communiste contenant peut-être d'anciens secrets. Un faire-part de naissance, le collier d'une grand-mère, une bague punk ou une carte postale... Une paire de galoches voisine avec les sabots offerts par Jean-Michel Basquiat à Yvon Lambert, au retour d'une virée narcotique. Un boubou transmis de génération en génération dialogue avec Les Reines de France d'Anselm Kiefer, où l'artiste détourne une petite robe. Une croix de Camargue converse avec des bougies de Fatima photographiées par Nan Goldin, qui revient très régulièrement au fil de l'accrochage avec ses images de maternité évoquant les madones ou ses scènes d'amour. Au fil de la visite, des oeuvres de Jannis Kounellis, Miquel Barcelo, On Kawara, Yann Sérandour ou Andres Serrano viennent compléter le projet.

Intimes, les objets reprennent des thématiques universelles qui traversent l'histoire de l'art, la mémoire qui est également au cœur du travail de Christian Boltanski, l'amour, le sacré et même le paysage... Dans ambiance lumineuse, la nature apparaît dans une salle avec un appeau, une cruche, une canne à pêche, mais aussi des empreintes de chlorophylle de Giuseppe Penone ou une installation en ardoise du land-artiste de Richard Long. En regard de photos de nuages prêtées par un participant, David Horvitz envoie chaque jour une photo du ciel. L'aventure continue...

Jusqu'au 29 janvier 2023. Mardi au dimanche, 11 h-18 h. Collection Lambert, 5 rue de la Violette, Avignon. 10 €, réduit 8, enfants 2 €. 04 90 16 56 20.


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